Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 4.djvu/96

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une multiplicité infinie d’incidents sublimes. Le premier mouvement est d’écrire, de communiquer à la mémoire ces héroïques efforts, ces élans divins de la volonté. Plus on les recueille, plus on en raconte, plus on en trouve à raconter. Le découragement vient alors ; l’admiration, sans s’épuiser, se lasse et se tait. Laissons-les, ces grandes choses que nos pères ont faites ou voulues pour l’affranchissement du monde, laissons-les au dépôt sacré où rien ne se perd, la profonde mémoire du peuple, qui, jusque dans chaque village, garde son histoire héroïque ; confions-les à la justice du Dieu de la liberté, dont la France fut le bras en ce grand jour, et qui récompensera ces choses (c’est notre foi) dans les mondes ultérieurs.

Qui croirait que, devant cette scène admirable, splendidement lumineuse, l’Europe ait fermé les yeux, qu’elle n’ait rien voulu voir de tant de choses qui honorent à jamais la nature humaine, et qu’elle ait réservé toute son attention pour un seul point, une tache noire de boue et de sang, le massacre des prisonniers de septembre ?

Dieu nous garde de diminuer l’horreur que ce crime a laissée dans la mémoire ! Personne, à coup sûr, ne l’a sentie plus que nous ! Personne n’a pleuré peut-être plus sincèrement ces mille hommes qui périrent, qui presque tous avaient fait, par leur vie, beaucoup de mal à la France, mais qui lui firent par leur mort un mal éternel. Ah ! plût au ciel qu’ils vécussent ces nobles qui appelaient