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Qu’on ne demande pas maintenant pourquoi la Convention vint se rasseoir le 3 juin sur ses bancs déshonorés. Elle revint pour deux causes.

Elle se sentait comptable au genre humain, ayant ces grandes choses à faire.

Elle ne pouvait se retirer, dans l’horrible péril où était la France, sans lui donner le coup de grâce. La retraite eût été un crime.

La France désorganisée et quasi dissoute, ouverte par toutes ses frontières, sans gouvernement, sans défense, au centre, frappée par la Vendée (qui, le 10, devint maîtresse de la route de Paris), avait encore une force, une seule, son Assemblée. Elle était tout entière suspendue à ce faible fil que l’on pouvait croire brisé.

Malheur à qui eût compté avec l’honneur personnel dans une telle situation ! Il fallait tout endurer, ne rien voir et ne rien sentir, avaler l’outrage et les larmes, et se rasseoir dans la honte, la nier si l’on pouvait, soutenir qu’on avait été libre et que toujours on était libre. C’est ce que fit la Montagne, et elle sauva la France, dont la seule et dernière ressource était dans l’autorité de la Convention.

Le procès-verbal du 2 juin, rédigé et arrangé par l’homme le plus timide de l’Assemblée, Durand de Maillane, homme de droite qui votait à gauche, fut indéfiniment ajourné et ne parut que longtemps après. Lorsque Grégoire demanda en rentrant que le procès-verbal constatât l’insulte faite à l’Assem-