Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 6.djvu/195

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la confession, profanant dans un seul acte deux religions à la fois : la nôtre et celle du passé.

Où donc était-il, cet autel consacré par nos assemblées à la religion de la Loi, sur les ruines du vieil autel de l’arbitraire et de la Grâce ? Où était-il, l’autel de la Révolution, où le bon Camille, l’ami de Danton, avait porté son nouveau-né, donnant le premier l’exemple aux générations à venir ?

Ceux qui connaissent les portraits de Danton, spécialement les esquisses qu’en surprit David dans les nuits de la Convention, n’ignorent pas comment l’homme peut descendre du lion au taureau, que dis-je ? tomber au sanglier, type sombre, abaissé, désolant de sensualité sauvage.

Voilà une force nouvelle qui va régner toute-puissante dans la sanguinaire époque que nous devons raconter ; force molle, force terrible, qui dissout, brise en dessous le nerf de la Révolution. Sous l’apparente austérité des mœurs républicaines, parmi la terreur et les tragédies de l’échafaud, la femme et l’amour physique sont les rois de 1793.

On y voit des condamnés qui s’en vont sur la charrette, insouciants, la rose à la bouche. C’est la vraie image du temps. Elles mènent l’homme à la mort, ces roses sanglantes.

Danton, mené, traîné ainsi, l’avouait avec une naïveté cynique et douloureuse dont il faut bien modifier l’expression. On l’accusait de conspirer. « Moi ! dit-il, c’est impossible !… Que voulez-vous