Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 6.djvu/248

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heures par jour. Matinal, ardent, exact, serré, propre dans sa mise, âpre d’esprit, de paroles, amer, mais si sage pourtant qu’il dominait ce caractère. Il tenait beaucoup, en bien et en mal, de l’ancien parlementaire , mais avec une originalité spéciale de grand légiste normand, de ces Normands d’autrefois qui gouvernèrent au Moyen-Âge les conseils, les parlements, la chancellerie l’Échiquier, de Normandie, de France et d’Angleterre.

Lindet était cruellement haï des Girondins, moins pour sa proposition du tribunal révolutionnaire, moins pour ses discours haineux (il montait peu à la tribune ) que pour son opposition persévérante dans les comités, pour son attitude critique, ironique, dans la Convention, pour sa bouche amèrement sarcastique et voltairienne, qui, même sans rien dire, déconcertait parfois leurs plus hardis discoureurs.

Il se trouvait, au 2 juin, que Brissot, dans une brochure, venait d’attaquer Lindet avec une extrême violence, accusant son air hyène, son amour du sang. Ce fut justement cette attaque qui permit à Lindet d’être modéré.

Cette brochure, à laquelle il répondit avec amertume, ce précieux brevet d’hyène que lui décernait la Gironde, le couvraient parfaitement et lui permettaient de faire des choses sages et humaines que personne n’eût pu hasarder.

Personne n’eût pu essayer de sauver Lyon, comme il tenta de le faire, ni dire pour elle les paroles qu’il prononça à la Convention. Notez qu’il avait singuliè-