Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 6.djvu/355

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larmes, accusant amèrement sa propre nature, son incapacité militaire. Il ne tenait pas à lui qu’on ne crût qu’un commis de la guerre, un certain Aubigny, dirigeait presque seul les mouvements des armées, et qu’on ne lui rapportât nos victoires.

Quelle qu’ait été sa répugnance, qui eût tout arrêté dans un autre moment, le Comité, sous l’aiguillon d’un tel danger, passa outre et, le soir du 11, envoya Carnot avec ses pouvoirs à l’armée du Nord. Le 14, il se le fît adjoindre avec Prieur (de la Côte-d’Or).

Le soir même du 11, Robespierre alla droit du Comité aux Jacobins. Soit que toute opposition contre son sentiment lui parût trahison contre la République, soit que sa sombre et maladive imagination lui fît croire véritablement que ses collègues trahissaient, soit enfin qu’il craignît la Prusse et voulût se laver les mains d’un acte si hardi contre les hébertistes, il lança contre ses collègues une diatribe épouvantable, et cela d’une manière inattendue et brusque, à la fin d’un discours qui faisait attendre autre chose.

Il se trouvait précisément que le président des Jacobins avait fort à propos cédé le fauteuil à l’homme qui sans nul doute était le plus intéressé au succès de la dénonciation de Robespierre. C’était Hébert qui présidait et qui plus d’une fois soutint, encouragea l’orateur interrompu par des murmures.

Robespierre parla quelque temps sur ce texte : « C’est toujours Dumouriez qui commande nos