Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 6.djvu/388

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le noyèrent de leurs larmes, l’enlacèrent de mille ruses, d’invincibles prières, de ces douloureuses caresses où se brisent les nerfs de l’homme. Telle se réfugia hardiment chez son juge, s’y cacha et n’en sortit plus.

D’autres membres étaient compromis d’une manière plus fâcheuse encore, par des affaires d’argent. Mais ce qui rendait la situation du Comité de sûreté extrêmement périlleuse, c’est qu’il gardait obstinément les pièces du procès des Girondins, n’en faisant point usage et les refusant à Fouquier-Tinville. Sa répugnance était insurmontable pour les envoyer à la mort.

Les Jacobins disaient à Fouquier : « Juge ou meurs ! » Fouquier se rejetait sur le Comité. Le 19 août, il écrivait à la Convention qu’on ne lui donnait pas les pièces. L’Assemblée ordonne que le Comité fera son rapport sous trois jours, et le Comité fait toujours le mort. Nouvelle lettre de Fouquier-Tinville à l’Assemblée : « Si le tribunal est insulté, menacé dans les journaux et dans les lieux publics, pour sa lenteur à juger la Gironde, il l’est à tort… Les pièces ne sont pas dans ses mains. » Amar, le futur rapporteur, vient balbutiant au nom du Comité, allègue gauchement la complication de l’affaire. Amar, ex-trésorier du roi, était un homme très compromis lui-même. Nous avons donné cette longue explication pour montrer comment le Comité in extremis, accusé chaque jour et presque aussi malade que la Gironde