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chassé des Jacobins. Il arrêta tout par l’audace : « Je ne veux pas vous ôter ce plaisir. Faites ce qu’il vous plaît ! » cria-t-il. Les politiques se radoucirent. Ils sentirent qu’ils allaient lui ramener l’opinion, le rendre intéressant. Robespierre l’excusa en l’humiliant, disant « que sans doute il ne faisait qu’ajourner son repentir ».

Au moment où la nouvelle de cette séance arriva à Saumur, Rossignol, malade de ses orgies, était dans sa baignoire. Ronsin exploita le succès. Il crut que Rossignol, soutenu à ce point par Robespierre et par Danton, Rossignol, l’objet de ce monstrueux engouement, divinisé vivant, devenu impeccable, pouvait faire passer tous les crimes, et que lui Ronsin, sans péril, pouvait, avec la main de cet inepte dieu, assassiner ses ennemis.

De la baignoire, sous sa dictée, Rossignol écrit : 1° aux Jacobins, qu’il a déjà eu un grand avantage (il n’y avait rien eu) ; 2° à Canclaux, que le conseil de guerre tenu le 11 n’est pas d’avis qu’on coopère à ses mouvements.

Canclaux et l’armée mayençaise étaient en mouvement. L’affaire était lancée. Dans cinq départements, le tocsin sonnait et la levée en masse se faisait pour ce coup décisif. Tout le monde partait (de dix-huit ans à cinquante) avec fusils, fourches et faux. Chacun prenait six jours de vivres. On dit que quatre cent mille hommes étaient levés. Fallait-il que Rossignol, de sa baignoire, arrêta tout ? Cela paraissait difficile. Le ridicule aussi était immense. Et que diraient les