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réaliser en affirmation vivante ce qui chez lui fut négatif. — Je m’explique : Elle devait montrer que sa négation d’une religion arbitraire de faveur pour les élus contient l’affirmation de la religion de justice égale pour tous ; montrer que sa négation de la propriété privilégiée contient l’affirmation de la propriété non privilégiée, étendue à tous.

Voilà ce que la Révolution devait à son illustre père, le dix-huitième siècle : briser le noyau scolastique qui contenait sa doctrine, en tirer le fruit de vie.

Dès ce jour, elle vivait, et elle pouvait dire : « Je suis. » À elle, la vie, le positif. Et l’Ancien-Régime, convaincu d’être le vide, s’évanouissait.

La Révolution réserva justement les deux questions où était la vitalité. Elle ferma un moment l’église et ne créa pas le temple. Elle changea la propriété de main, mais la laissa monopole ; le privilégié renaquit comme usurier patriote, bande noire, agioteur, tripotant dans l’assignat et les biens nationaux[1].

Quels remèdes ? La répression individuelle, la sévérité croissante, vieux moyens gouvernementaux, furent de moins en moins efficaces. Émonder servait très peu, si la racine était la même. C’est elle qu’il eût fallu changer par la force d’une

  1. Ce dernier point fut marqué fortement par la Commune le 5 septembre, par Saint-Just le 16 octobre : « De nouveaux seigneurs, non moins cruels, s’élèvent sur les ruines de la féodalité », dit Chaumette. Et Saint-Just, avec douleur : « Nos ennemis ont tiré profit de nos lois ! »