Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 6.djvu/473

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Et du caméléon mobile, homme d’affaires, tout pratique : ce mariage étonnant mérite d’être expliqué.

Clootz, comme tout Allemand, arrivait du fond du panthéisme, de la nature et de l’infini ;

Chaumette, comme tout Français (et celui-ci de basse espèce), partait de l’individualisme, du particulier, du jour, de l’aventure quotidienne, qui en tout temps n’est guère que l’infiniment petit.

Une chose les ralliait, celle qu’ils avaient tous deux haïe, dans les Girondins, l’esprit décentralisateur.

La générosité de Clootz, son ardent amour de la France, où il fut amené enfant, le désintéressait de l’Allemagne. Il était Français, regardait le Rhin comme un futur département de la République française. Il était décentralisateur de l’Allemagne, à force d’aimer la France.

Chaumette, c’était le contraire. Il n’avait pas à décentraliser une patrie étrangère ; il ne connaissait que Paris. Il était la voix, l’agréable organe du chaos discordant de la Commune. Ce chaos, dans sa bouche, était harmonie. Sa vie, sa voix, étaient municipales. Donc, avec toutes ses déclamations violentes contre les décentralisateurs, il n’était décentralisateur qu’au profit de la grande et redoutable Commune, qui, il est vrai, contient le tout.

Le tout ? est-ce seulement la France ? Ne le croyez pas. Paris, c’est le monde.