Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 6.djvu/541

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Robespierre n’était pas bien sûr d’être pur. Et comment savoir dès lors qui devait vivre, qui devait mourir ?

Ces choses étaient de nature à faire profondément songer la Convention. Elles lui prêtèrent le courage de rejeter violemment l’opération analogue que lui proposait Robespierre.

On se rappelle qu’Israël, voulant massacrer les Éphraïmites au passage du Jourdain, leur fît prononcer Shiboleth, et quiconque prononçait mal était mis à mort. C’est une opération dans ce genre que Robespierre, le 15 décembre, demandait qu’on fît subir à la Convention, aux suppléants pour commencer. Les historiens robespierristes assurent (et je les en crois) que tous les membres auraient subi cette épreuve. Il s’agissait de faire dire à chacun sa profession de foi sur tous les événements de la Révolution. Des dissentiments innombrables auraient éclaté, le fractionnement réel de la Convention eût été visible et sa faiblesse palpable ; toute coalition pour la République et le droit de l’Assemblée serait devenue impossible.

Romme, irréprochable lui-même et qui eût pu parler haut, sentit le coup et s’empara de la proposition en la resserrant, bornant tout à ces questions : « Que pensez-vous du 6 octobre ? du 21 juin, du jugement de Capet ? de Marat ? » La Convention adopta, puis, sur la demande de Thibaudeau, rétracta l’adoption, déclina toute profession de foi ; ce qui signifiait qu’en cas de coalition contre la