Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 7.djvu/244

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plia, dans son horrible dernier mois, pour saouler la guillotine de plus en plus affamée, et qui, faute d’aliment, allait dévorer ses maîtres.

Là parut pour la première fois la race nouvelle des moutons, c’est-à-dire des bons prisonniers qui écoutaient et dénonçaient les autres. Cette race multiplia. Le mouton Laflotte, qui, par sa délation du Luxembourg, avait fourni le moyen de tuer Danton, donna l’exemple aux moutons Benoît et Beausire, qui firent ici leurs premières armes et s’illustrèrent en messidor.

Les accusés ne se connaissaient pas. À peine s’étaient-ils vu. Tout ce qui les rapprochait, c’était la crainte commune qu’ils avaient eue d’un 2 septembre. L’apôtre Chaumette vit pour la première fois le général des Girondins de Nantes, le joyeux Beysser, qui continuait de boire et faire des chansons. La jeune Lucile Desmoulins y rencontra Mme Hébert, ex-religieuse, spirituelle, intrigante, qui avait tripoté avec les agioteurs, mais conspiré nullement. Le dantoniste Simon, Grammont l’hébertiste, Gobel, évoque de Paris, tous ensemble, sans savoir pourquoi. Le royaliste Dillon s’y trouva en compagnie d’un des grands exécuteurs des royalistes de Lyon, le commissaire Lapallus. Que faisait-là celui-ci ? C’était une pièce d’attente. Cet ingénieux procès, fils du grand procès (Hébert et Danton), engendrait, par Lapallus, un autre procès non moins grave, celui des affaires de Lyon, qu’on entama en guillotinant Marino, qu’on pour-