Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 7.djvu/287

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

valeur d’un aveu d’inconciliables discordes. Elle mettait à nu le trouble intérieur du Comité, semblait une amère satire du gouvernement collectif, un titre pour qui eût réclamé le gouvernement d’un seul et la création de la dictature.

Elle poussait à la grandeur de Robespierre. Elle brisait les utopies draconiennes de Saint-Just.

L’un eût voulu avancer dans les mondes inconnus. L’autre eût voulu enrayer.

Et le décret résultant de ces tendances diverses montrait trop que désormais la Révolution ne pouvait avancer ni reculer.

Quelque découragé que fût Saint-Just et sans espoir sur l’avenir, il ne refusa pas de présenter cette production étrange à la Convention. Il était le rapporteur désigné et attendu, il ne se fût abstenu qu’en dénonçant par son silence la discorde intérieure du Comité, et celle même du triumvirat, c’est-à-dire en portant le coup le plus grave à l’autorité du gouvernement. C’était l’entrée de la campagne ; d’énormes armées alliées apparaissaient à l’horizon. Saint-Just, avec une vraie grandeur, couvrit la situation. En tête de ce décret, il lut l’immense rapport qu’il avait préparé, dans un tout autre esprit.

Quelque soin pourtant qu’il ait mis à effacer du rapport tout ce qui eût rappelé les dissentiments, on y trouve une chose bien grave et bien peu robespierriste, un éloge de Marat. Saint-Just n’ignorait nullement que Robespierre, très antipathique