Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 7.djvu/96

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judicieux des chefs vendéens. L’idéal de Bonchamps avait toujours été l’union de la Vendée et de la Bretagne.

À ce moment, il espérait justement dans le désespoir, dans les forces qu’il donnerait, quand, ayant quitté son fort, son profond Bocage, et mise en rase campagne, la Vendée courrait la France, dont les forces étaient aux frontières. Cette course de sanglier voulait une rapidité un élan terrible, une décision vigoureuse d’hommes et de soldats. Bonchamps n’avait pas calculé que dix ou douze mille femmes s’accrocheraient aux Vendéens et se feraient emmener.

Elles crurent trop dangereux de rester dans le pays. Aventureuses d’ailleurs, du même élan qu’elles avaient commencé la guerre civile, elles voulurent aussi en courir la suprême chance. Elles jurèrent qu’elles iraient plus vite et mieux que les hommes, qu’elles marcheraient jusqu’au bout du monde. Les unes, femmes sédentaires, les autres religieuses (comme l’abbesse de Fontevrault), elles embrassaient volontiers d’imagination l’inconnu de la croisade, d’une vie libre et guerrière. Et pourquoi la Révolution, si mal combattue par les hommes, n’aurait-elle pas été vaincue par les femmes, si Dieu le voulait ? On demandait à la tante d’un de mes amis, jusque-là bonne religieuse, ce qu’elle espérait en suivant cette grande armée confuse où elle courait bien des hasards. Elle répondait martialement : « Faire peur à la Convention. »