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Jésus-Christ. » (Sermon prêché à Leipsick, en 1519, sur la justification.)

Cette dangereuse doctrine fut accueillie par le peuple et par la plus grande partie des lettrés. Érasme, le plus célèbre d’entre eux, paraît seul en avoir senti la portée. Esprit critique et négatif, émule du bel esprit italien Laurent Valla, qui avait écrit au quinzième siècle un livre De libero Arbitrio, il écrivit lui-même contre Luther, sous ce même titre. Dès l’année 1519, il reçut avec froideur les avances du moine de Wittemberg. Celui-ci, qui sentait alors combien il avait besoin de l’appui des gens de lettres, avait écrit des lettres louangeuses à Reuchlin et à Érasme (1518, 1519). La réponse de ce dernier est froide et significative (1519). « Je me réserve tout entier pour mieux aider à la renaissance des belles-lettres ; et il me semble que l’on avance plus par une modération politique (modestia civili) que par l’emportement. C’est ainsi que le Christ a amené le monde sous son obéissance c’est ainsi que Paul a aboli la loi judaïque en tirant tout à l’interprétation. Il vaut mieux crier contre ceux qui abusent de l’autorité des prêtres que contre les prêtres eux-mêmes. Il en faut. faire autant à l’égard des rois. Au lieu de jeter le mépris sur les écoles, il faut les ramener à de plus saines études. Lorsqu’il s’agit de choses trop enfoncées dans les esprits pour qu’on puisse les en arracher d’un seul coup, il faut procéder par la discussion et par une argumentation serrée et puissante, plutôt que par affirmations... Il faut toujours prendre garde de ne rien dire, de ne rien