Page:Michelet - Quinet - Des jésuites, 1843.djvu/147

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idées ont toujours été tournées de ce côté, et qu’il m’est, pour ainsi dire, impossible de détacher de l’influence religieuse aucune partie des choses humaines. L’homme, depuis quelque temps, a été si souvent trompé par l’homme, qu’il ne faut pas s’étonner s’il ne veut plus se passionner que pour Dieu. Mais, cela admis, quels ont été les premiers missionnaires de cet Évangile renouvelé ? Je réponds : les penseurs, les écrivains, les poëtes, les philosophes. Voilà, on ne le contestera pas, les missionnaires, qui partout, en France et en Allemagne, ont commencé les premiers à rappeler ce grand fonds de spiritualité qui est comme la substance de toute foi réelle. Chose étrange, à peine ont-ils consommé cette œuvre de précurseurs, ils reçoivent l’anathème ! On se persuade que, puisque l’esprit humain s’est relevé vers le ciel, c’est sans doute pour se renier et s’abêtir pour jamais ; que le moment est venu d’en finir avec la raison de tous, et qu’il faut au plus vite l’ensevelir dans ce Dieu qu’elle vient de retrouver d’elle-même. Comme il est arrivé en toute occasion, on se dispute la propriété exclusive et les prémices de ce Dieu renaissant. Mais ce mouvement religieux, je le vois plus profond, plus universel qu’on ne veut le laisser paraître. Chacun prétend l’enfermer, le circonscrire, le murer dans une enceinte particu-