Page:Michelet - Quinet - Des jésuites, 1843.djvu/54

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aux mains du grand artiste qui va sculptant son œuvre à jamais.

Ainsi, quand le christianisme est vainqueur, les dieux païens aiment mieux fuir. Ils vont chercher les forêts ; ils vivent là farouches et de plus en plus sauvages ; les vieilles femmes cabalent pour eux sur la bruyère de Macbeth. Le moyen âge regarde cette tendance obstinée vers le passé, cet effort d’aller en arrière, lorsque Dieu mène en avant, il le regarde comme le mal suprême, et il l’appelle le Diable.

Même horreur pour les Albigeois, lorsque ceux-ci, qui se disaient chrétiens, renouvelèrent la dualité persane, manichéenne, comme, si en plein christianisme, Arimane était revenu s’asseoir à côté de Dieu.

Moins grossier, mais non moins impie, semble avoir été le mystère du Temple.

Étrange religion de soldats moines qui, dans leur mépris des prêtres, semblent avoir mêlé les superstitions des anciens gnostiques et des musulmans, ne voulant plus de Dieu que le Saint-Esprit, l’enfermant avec eux dans le secret du Temple, le gardant pour eux. « Leur vrai Dieu devint l’ordre même. Ils adorèrent le Temple et les Templiers, comme temples vivants… Leurs symboles exprimèrent le dévouement aveugle, l’abandon complet de la volonté. L’ordre, se