Page:Michelet - Quinet - Des jésuites, 1843.djvu/71

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l’histoire des jésuites ajoute : « On vit ces forcenés tirer les uns sur les autres et s’entretuer sous les yeux des Anglais, que cet étrange spectacle tenait dans un saisissement mêlé d’horreur. »

Malheureux, que vous connaissez peu la génération héroïque que vous calomniez au hasard… Ceux qui ont vu de près ces braves, peuvent dire si leur calme courage fut jamais mêlé de fureur… Plus d’un que nous avons connu, eut la douceur d’un enfant… Ah ! ils ont été doux, les forts[1] !

Si peu que vous ayez de prudence, ne parlez jamais de ces hommes, jamais de ces temps. Taisez-vous sur

  1. Que de faits je pourrais citer ! en voici un, qui mérite d’être sauvé de l’oubli. A la bataille de Wagram, une des batteries de la garde impériale se trouva établie pour quelques moments sur un champ couvert de blessés ennemis ; l’un d’eux, qui souffrait horriblement de sa blessure, de la soif et de la chaleur, criait aux Français de l’achever ; furieux de n’être pas compris (il parlait hongrois), il se traîne vers une arme chargée, et il essaie de la tirer sur les canonniers ; l’officier français lui ôta l’arme des mains, et suspendit quelques habits à un faisceau de fusils pour lui faire de l’ombre. — Cet officier était M. Fourcy-Gauduin, capitaine de l’artillerie de la garde, excellent historien de l’École polytechnique, qui a fait des poésies charmantes à travers ces guerres terribles et sur tous les champs de bataille de l’Europe. Il a cette simple épitaphe à notre cimetière du midi : Hinc surrecturus. Et plus bas : Stylo et gladio meruit. Les deux premiers mots, si nobles et si chrétiens, sont ceux qu’il avait lui-même écrits sur la tombe de sa mère. [Hinc surrectura !]