Page:Michelet - Quinet - Des jésuites, 1843.djvu/92

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Dans ces écoles (trop mal jugées), on apprenait peu, il est vrai, mais on s’exerçait beaucoup. Au seizième siècle, le point de vue change ; on veut savoir. La science s’accroît tout à coup de tout le monde ancien, qu’on vient de retrouver ; par quels moyens mécaniques se mettre dans la mémoire cette masse de mots et de choses ?

Cette science inharmonique n’avait produit que le doute ; tout flottait, les idées, les mœurs. On imagina, pour tirer l’esprit humain d’une telle fluctuation, la forte machine de la société des Jésuites, où, bien engagé une fois, et solidement rivé, il ne bougeât plus.

Qu’arriva-t-il ? C’est que cette idée barbare de serrer ainsi dans des tenailles la vie palpitante, manqua ce qu’elle voulait. Lorsqu’on croyait tenir, on ne tenait pas ; on se trouva n’avoir serré que la mort.

Et la mort gagna. Un esprit de défiance, d’inaction, se répandit dans l’Église. Le talent fut en suspicion. Les bons sujets furent ceux qui se turent. On se résigna au silence de plus en plus aisément ; on s’habitua à faire le mort. Quand on le fait si bien, c’est qu’on est mort en effet.