Page:Mickiewicz - Les Slaves, tome 1.djvu/145

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elle porte les siens au rivage, elle porte tous les siens.

» — Jusque-là, vers ces montagnes bleues portons le carnage et la vengeance.

» — Zaboï, frère, nous n’avons plus beaucoup de chemin à parcourir, car il n’y a qu’une poignée d’ennemis qui se sauvent vers les montagnes, et cette poignée avec ses larmes implore notre merci.

» — Maintenant retournons, abandonnons le reste.

» — Le vent parcourt tous les pays à la fois, les armées courent vers tous les pays.

» — O ! mon frère, voici le sommet bleu, c’est là que les dieux nous donnèrent la victoire. Là les âmes par troupes courent d’arbre en arbre. Les oiseaux en sont effrayés, les bêtes fauves en ont peur. Le hibou seul ne les craint pas. Là sur le sommet bleu allons ensevelir les morts, présentons aux dieux les mets des sacrifices, aux dieux sauveurs donnons un sacrifice splendide. Nous leur adresserons des actions de grâces en leur offrant les armes des vaincus. » —

La lutte entre le christianisme et le paganisme, qui fait le sujet de ce poëme, se poursuit encore aujourd’hui dans la littérature slave. Plusieurs slavophiles ont accusé le christianisme d’avoir détruit les anciens monuments nationaux. Mais aucun d’eux n’a jamais compris l’établissement de la religion chrétienne. On la représente toujours comme une religion nouvelle et violemment imposée aux Slaves. Cependant le christianisme ne peut être considéré comme une chose toute nouvelle ; il ne venait pas détruire les