Jusqu’à ce que son maître apaise sa colère.
Le réfractaire aussi vient s’y blottir parfois,
Tandis que les soldats le cherchent sous les bois.
Aussi, dans les combats et dans les coups de force,
Avant tout autre objet, chaque parti s’efforce
De s’emparer du chanvre. Et c’est avec raison :
Car par devant il touche aux murs de la maison,
Et, de l’autre côté, bordant la houblonnière,
Il permet d’attaquer ou de fuir par derrière.
Bien que Protais soit brave, il n’est pas sans frayeur.
Le chanvre lui rappelle encor par son odeur
De son passé d’huissier mainte mésaventure,
Où son fourré lui fut une retraite sûre :
Un jour, il assignait le szlachcic Dzindolet,
Qui voulut, lui mettant au front son pistolet,
Lui faire rétracter[1] son exploit sous la table :
Il trouva dans le chanvre un abri secourable.
Plus tard Wołodkowicz, seigneur fier et brutal[2],
Qui sabra maintes fois diétine et tribunal,
Ayant d’abord reçu l’exploit, le mit en quatre,
Et, montrant ses heïduks apostés pour le battre,
Lui-même de son sabre il menaça l’huissier,
Lui criant : « Ou je frappe, ou mange ce papier. »
— « Soit, mangeons », dit d’abord l’huissier plein de prudence,
Et puis par la fenêtre en plein chanvre il s’élance.
On ne recevait plus alors comme autrefois
A coups de pistolet l’huissier porteur d’exploits,
Et l’on se contentait de l’accabler d’outrages.
Mais Protais ignorait ce changement d’usages,
Car depuis fort longtemps il n’avait exercé.
Souvent lui-même au Juge il s’était proposé ;
Mais le Juge toujours, épargnant sa vieillesse,
Rejetait sa prière, et c’est que le temps presse
S’il l’a pris aujourd’hui.
L’huissier écoute en vain :
Aucun bruit ; dans le chanvre il avance une main,