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Page:Mickiewicz - Thadée Soplitza, trad. Gasztowtt.pdf/186

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Maciej près de l’entrée attend, sa Verge en main,
Se cachant comme un chat guettant des rats ; soudain
Il frappe… Il eût peut-être abattu les trois têtes,
Mais il ne vit pas bien, n’ayant pas ses lunettes :
Sur les casquettes donc ce coup mortel porta,
Sur les pointes d’acier sa Verge ressauta.
Mais les Russes ont fui. Maciej d’ardeur redouble
Et les suit dans la cour.

Et les suit dans la cour. Là règne aussi le trouble.
Les gens de Soplitza courent tous à la fois
Oter aux Dobrzyński leurs entraves de bois.
Un sergent qui les suit vole et sur eux se jette.
Il tue un Podhaïski d’un coup de baïonnette ;
Deux autres sont blessés par le même agresseur.
On fuit. C’était auprès du vaillant Bénisseur.
Ses mains étaient déjà libres et disponibles.
Il se lève, et, fermant ses doigts longs et terribles,
Sur le dos du sergent les assène si bien,
Que son front du fusil s’en va heurter le chien.
Le coup part ; mais le sang avait mouillé la poudre :
Le sergent s’abattit mort sous ce coup de foudre.
Le Bénisseur se penche et prend par le canon
Le fusil qu’il agite ainsi qu’un goupillon.
Son moulinet atteint deux soldats, qu’il arrête
Net, et du caporal il va frapper la tête :
Loin des poutres alors le reste s’est enfui,
Et la noblesse trouve un abri près de lui.

On arrache les bois, les cordes, les ceintures.
Quand tous sont délivrés, on pille les voitures :
On en tire couteaux, rapières, pistolets,
Faux, fusils. Le Cruchon y trouve deux mousquets[1]
Et des balles . ; il charge alors son arme et cède
L’autre mousquet à Sak, son second et son aide.

Le nombre des jœgers augmente : il faut lutter
Corps à corps ; on ne peut ni parer, ni pointer,
Ni viser, ni tirer. On se touche, on se presse ;
L’acier heurtant l’acier brille et vibre sans cesse.
Sabres, faux et fusils, tout se heurte et se joint :
Le bras pousse le bras, le poing touche le poing.

  1. Dont l’un est son tromblon.