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ANTHOLOGIE DES HUMORISTES

charitables, une pauvre vieille de quatre-vingt-dix-sept ans, qui n’pouvont plus gagner sa pauvre vie.

(L’aveugle estropie sur la clarinette la valse de Robin des Bois.)

Le crétin. — Aboûum, aboûum ! fâ fâ ! aboûum, aboûum ! (Il se présente à la portière du coupé.)

Ernestine. — Ah ! mon père ! quelle horreur !

M. de Verceilles. — Qu’est-ce encore ?

Le crétin. — Aboûum, aboûum ! fâ fâ ! aboûum !

M. de Verceilles. — Il est affreux ! Retirez-vous ! Voulez-vous vous retirer ?

Adrien, au crétin. — Tiens, te voilà, mon pauvre Pierre ; tu n’as donc pas encore trouvé à te marier ?

Le crétin. — Aboûum, aboûum ! fâ fâ ! aboûum !

Adrien. — Tu dis toujours la même chose.

Le crétin. — Fâ fâ ! aboûum, aboûum !

Adrien. — Tiens, voilà un sou ; fais le beau. (Le malheureux lève les bras en l’air et se tient en équilibre sur les pointes de ses sabots.) C’est bien, va-t’en, on en a assez. — Eh ! Fournais, voulez-vous prendre quelque chose ?

Le conducteur. — Nous avons bien le temps ! Allons, allons, messieurs, voyons, dépêchons-nous.

Le voyageur. — Conducteur, ouvrez-nous la portière.

Le conducteur. — Ah ben, oui, vous ouvrir ! j’vous connais ; nous n’en finirons jamais… Au prochain relais, ça n’est pas long.

M. Prudhomme. — Je vous intime l’ordre de m’ouvrir, m’entendez-vous, conducteur ?

Le conducteur. — Oui, mon gros papa. — Allons donc, postillon, à cheval… allons-nous coucher ici ?

La vieille dame. — Conducteur, avez-vous demandé mon verre d’eau sucrée ?

Le conducteur. — On vous le fait, madame ; vous l’aurez au prochain relais.