Page:Mirabeau - Hic et Hec, 1968.djvu/39

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tâmes quelques moments immobiles et considérant d’un œil calme et satisfait la beauté des corps qui nous touchaient ; la dame rompit le silence qui succéda à la jouissance par ces mots :

— Ah ! Valbouillant, qu’est-ce que le mariage auprès des délices que nous goûtons.

— Ah ! ma chère, reprit-il en embrassant Babet, elle, moi successivement, je ne puis trop remercier l’abbé de m’avoir fait cocu.

Nous aidâmes nos belles à se rhabiller ; la toilette fut plus gaie que décente, et nous nous séparâmes après avoir bien recommandé le secret le plus profond à Babet sur tout ce qui venait de se passer. La pauvre petite avait pris tant de plaisir que sans cette recommandation et la menace de n’en plus goûter de pareil, elle aurait indubitablement été en faire le récit à ses jeunes compagnes, mais la crainte de la privation contint sa langue. Quand j’eus donné ma leçon à mon élève, je le ramenai dîner avec ses parents ; il y avait plusieurs étrangers qui parurent surpris, à ma jeunesse, qu’on m’eût choisi pour instituteur.

— Il a reçu une parfaite éducation, dit Valbouillant, il est extrêmement instruit et nous nous trouvons très bien, madame et moi, de la confiance que nous avons mise en lui : sa jeunesse ne nous fait point de peine.

Cette réponse fit cesser les observations ; j’eus occasion de déployer un peu d’érudition et de développer des connaissances en littérature et, avant la fin du repas, les convives, charmés de mon goût, de la modestie et du ton de vertu qui