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Suite des Mœurs & Usages.

Cette décadence est chose possible. Ne nous laissons point à cet égard endormir par la prospérité. Nous pouvons dégénérer, & voici comment.

La prospérité jette dans l’excès ; celle de la fortune dans l’orgueil, celle des richesses dans le luxe, celle de l’esprit devient rafinement : la prospérité d’un État y établit les arts, les connoissances, & tout ce qui aiguise les ressorts de l’esprit qui ne se mêle d’abord que des choses de son district, & laisse au bon esprit, qui est toute autre chofe, les matières qui ressortissent à l’utilité publique, la Politique, les Loix, le Commerce, &c. Mais bientôt devenu bizarre & dédaigneux à force de se méconnoître & de chercher la nouveauté, il s’ingère à décider de tout, & introduit par tout le rafinement. Or en fait de Gouvernement le rafinement peut causer autant de maux que le délire.

Si, par exemple, ce défaut gagnoit un jour le nôtre, il enché-