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LE RIDEAU LEVÉ


reur passagère de constitution qui ne détruit pas les lois générales.

J’avoue que cette faveur faite aux hommes ne rejaillit par sur les femmes ; elles ne peuvent ordinairement produire qu’un seul être ; plusieurs hommes n’en feraient pas éclore davantage, et souvent même un mélange trop prompt détruirait le germe fructifiant, s’il n’avait pas été bien fixé, sans compter encore les fâcheux effets qui résulteraient d’un mélange diversifié et très prochainement successif ; cependant, si le premier germe avait pris de profondes racines, et qu’à quelque temps le même homme, ou un autre, anime et vivifie un nouveau germe, elles peuvent produire un second fruit, et même un troisième, mais ces cas ne sont pas dans le cours commun de la nature pour notre espèce.

Si cette nature a comblé les hommes de faveurs, elle n’a pas été tout à fait injuste ni marâtre envers elles : les femmes portent un vide qu’une nécessité perpétuelle, un appétit indépendant d’elles les porte à remplir ; si l’un ne le peut, ou ne le veut pas, un sentiment plus fort qu’elles et que tous leurs préjugés, en appelle un autre ; mais le choix dépend de leur goût. En effet, pourquoi vouloir absolument qu’elles souffrent les approches et les caresses de tel objet qu’elles abhorrent ? Que peut produire une union qu’elles détestent et qui les révolte ? Rien, ou des avortons qu’elles ont en horreur. Combien en voit-on d’exem-