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LE RIDEAU LEVÉ


écoutais avec tant de plaisir et d’avidité. J’ai rempli ma promesse : quel sacrifice je fais à la prudence ! Tu connais ton pouvoir sur moi ; tu sais combien je te chéris ; tu réunis aujourd’hui tous les sentiments de mon cœur ; partagés autrefois dans le monde et la société, tu les rassembles tous ; reçois-en pour assurance mille baisers que je t’envoie ; ils te diront combien je soupire après le doux instant de te les donner moi-même, enveloppée de tes bras et toi serrée dans les miens.

Ah ! ma chère, pourquoi cet instant n’est-il pas encore arrivé ! Je me flatte au moins qu’il sera très prochain. Je t’apporterai un bijou semblable à celui de Valsay, mais moins dangereux ; s’il n’est pas aussi naturel, ses avantages n’en sont pas moins grands, puisqu’il remplira, sans les risques des alentours, le vide qui se fait sentir dans nos plaisirs. Si tu te trouves bien de son usage, notre tendre amitié nous tiendra lieu de tout, et puisque Valsay se trouve dans l’obligation de s’éloigner de toi pour un temps, crois-moi, chère amie, laissons affaiblir les liaisons étrangères qui pourraient à la fin devenir fatales, étant hors de nous. J’irai bientôt à mon tour essuyer tes pleurs. Oui, tendre amie, oublions l’univers, pour ne nous en tenir qu’à nous-mêmes. Attends-moi donc au plus tôt.


FIN