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L’ANOSCOPIE

Peut-être serait-ce un ouvrage assez curieux que l’histoire détaillée, autant qu’elle peut l’être, des augures, des aruspices, des prophètes, de leurs manœuvres, des divinations de toute espèce, décrites ou dévoilées par l’œil sévère et perspicace d’un philosophe. Mais de toutes celles qu’il pourrait exposer aux yeux dessillés des nations, il n’en serait pas de plus bizarre que celle qui sauva d’une triste catastrophe une société fameuse par son zèle pour la propagation de la foi, et qui, trop persuadée que cette foi suffisait pour pénétrer dans les ténèbres de l’avenir, contracta, avec une légèreté fort imprudente, un engagement qu’elle n’aurait pu remplir, sans le secours fortuit d’un horoscope très-étrange.

Un essaim de Jésuites envoyés à la Chine, y prêchaient la vraie religion, lorsqu’une sécheresse effroyable sembla destiner cet empire à n’être plus qu’un vaste tombeau ; les Chinois allaient périr, et avec eux les Jésuites, vainement invoqués par le despote, sans un miracle qu’ils pressentirent avec une merveilleuse sagacité, et qui a rendu à jamais cette société fameuse dans ces contrées désolées. Un poëte moderne a raconté cette anecdote d’une manière plus piquante que nous ne le saurions faire, et nous nous bornerons à transcrire ses vers, sans approuver ses licences :

Fiers rejetons du fameux Loyola,
Dont Port-Royal a foudroyé l’école,
Vous que jadis sans cesse harcela
Le grand Pascal, étayé de Nicole ;
Vous qui, de Rome usant les arsenaux,
Fîtes frapper du fatal anathème,
Pour soutenir votre lâche système,
Les Augustins sous le nom des Arnauds ;
Vous, dont Quesnel, digne fils de Bêrule,
A tant de fois éprouvé la férule,