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LA LINGUANMANIE

Dans l’île de Sardaigne, qui n’a jamais été un pays très-florissant ni très-peuplé, le nom du lieu appelé Ancon avait pour étymologie celui de la reine Omphale, qui faisait tribader ses femmes ensemble, puis les enfermait indistinctement avec des hommes choisis pour briller dans ces sortes de combats[1].

On sait ce que le despotisme oriental a toujours coûté à l’humanité et à l’amour ; il a dans tous les temps foulé celle-là et profané celui-ci. C’est de Sardanapale[2], l’un des plus vils tyrans de ces contrées, que vient l’idée et l’usage d’unir la prostitution des filles et des garçons.

Corinthe pouvait le disputer à Samos pour la perfection de la prostitution publique ; elle y était tellement révérée qu’il y avait des temples où l’on adressait sans cesse des prières aux dieux pour augmenter le nombre des prostituées[3]. On prétendait qu’elles avaient sauvé la ville. Mais en général, les Corinthiennes passaient pour posséder presque exclusivement l’art de la souplesse et des mouvements voluptueux[4]. On

  1. Γλυκύν άγκῶνα. Ancon. Érasme, pag. 335. « Omphalis regina per vim virgines dominorum cum eorum servis inclusisse ad stuprum, ut sola haberetur impuditia. Lydi autem eum locum, in quo fœminæ constuprabantur, γλυκύν άγκῶνα, appellasse, sceleris atrocitatem mitigantes verbo. »
    On voit que, même en ce genre, le despotisme n’a plus rien à inventer.
  2. Σαρδανάπαλος. Érasme, Prov. XXVII, pag. 889. — « Cæterum deliciis usque adeo effeminatus, ut inter eunuchos et puellas, ipse puellari cultu desidere sit solitus. »
  3. Érasme, Prov. LXVIII, pag. 1018. « Ut dii augerent meretricum numerum. » Érasme ajoute que les Vénitiennes de son temps étaient les filles lubriques par excellence. « Nusquam uberior quam apud Venetos. » Ibid.
  4. Χοιροπωλήσειν, la Corobole, à χοῖρος. Érasme, Prov. XCL pag. 906. « Corinthia videris, corpore quæstum factura. In mulierem