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L’ANANDRYNE

tout à la fois agent et patient. Il fut livré à la justice et détenu jusqu’à sa délivrance. Néanmoins, le registre ajoute ces mots remarquables : « Ce moine appartenait à monseigneur le cardinal de Bourbon ; il avait les deux sexes, et de chacun d’iceux s’aida tellement, qu’il devint gros d’enfant. »

Je sais que l’on peut instituer une différence entre l’hermaphrodite proprement dit et l’androgyne. L’androgyne et l’hermaphrodite, pure invention des Grecs, qui voulaient et savaient tout embellir, ont été célébrés ainsi à l’envi par tous les poëtes, qui en faisaient des descriptions charmantes, tandis que les artistes les représentaient sous les formes les plus agréables et les plus propres à réveiller les sentiments de la volupté ; Pandore ne réunissait que les perfections de son sexe. L’hermaphrodite réunit toutes les perfections des deux sexes. C’est le fruit des amours de Mercure et de Vénus, comme l’indique l’étymologie du nom[1]. Or, Vénus était la beauté par excellence ; Mercure à sa beauté personnelle joignait l’esprit, les connaissances et les talents. Si on se forme l’idée d’un individu en qui toutes ces qualités se trouvent rassemblées, on aura celle de l’Hermaphrodite, tel que les Grecs ont voulu le représenter. Les androgynes, au contraire, sous la véritable acception de leur nom, ne sont que des participants aux deux sexes, que l’on n’a nommés hermaphrodites que parce que les anciens avaient feint que le fils de Mercure et de Vénus avait les deux sexes. Mais il n’en est pas moins vrai que, comme il y a eu de tout temps des femmes qui ont tiré un grand parti de cette

  1. Lucian., t. I, Dialog. deor. XV ; et Diod. de Sic., liv. IV, pag. 252, édit, de Westhling.