Page:Mirbeau - La Pipe de cidre.djvu/154

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— Nous aurons une femme de journée, mitoyenne ! disait Gaudon. Ce sera notre bonne mitoyenne… Nous aurons aussi un chien… mitoyen…

Et l’œil plus brillant, les pommettes enflammées, il pinçait son ami aux genoux, clamant :

— Ah ! sacré vieux Fleury, va ! Toi aussi, tu es mitoyen… tu es un ami… toyen…

À quoi Fleury, répondait en tapant sur l’épaule de Gaudon :

— Mitoyen… citoyen… ami… toyen… Est-il farce, ce sacré Gaudon !…

Depuis deux mois, la maison de M. Fleury est bâtie. Elle est pareille à celle de Gaudon. Les deux jardins se ressemblent aussi. Ils ne diffèrent que par le choix des fleurs qui les ornent. M. Gaudon n’aime que les géraniums ; M. Fleury préfère les pétunias. Ils sont parfaitement heureux. Presque toute la journée, assis sur la margelle du puits mitoyen, ils ne se quittent pas, et rêvent à de vagues et réciproques améliorations. L’heure du coucher seule les sépare. Ils ont une bonne qui les satisfait par sa propreté et sa connaissance du mironton. Quant au chien projeté, ils en ont remis l’acquisition à l’année suivante. Tous les