Page:Mirbeau - Théâtre III.djvu/279

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votre plus cher ami ? Et pas seulement l’ami de vos lèvres… de vos yeux… de vos cheveux… de toute votre chair ardente et… secrète…

L’Amante

Oh !… cela… Naturellement.

L’Amant

Ne suis-je pas aussi l’ami de votre pensée… de votre cœur… de votre âme ? (Ardent.) Ne suis-je plus l’âme de votre âme ?… Ah ! ce serait horrible !… Je vous en prie…

L’Amante

Non… laissez-moi… Ramenez-moi… Cela ne changerait rien que je vous dise… J’ai eu tort de vous montrer ma peine… Il vaut mieux que je sois seule à souffrir.

L’Amant

Seule à souffrir ?… Ah ! non, par exemple !… Je ne le permettrai pas… Ça, jamais… Vos douleurs, j’en veux ma part… toute ma part…

L’Amante

N’insistez pas… Vous me désobligez… Je vous assure que cela vaut mieux ainsi…

L’Amant, exalté.

J’en veux ma part… toute ma part… que dis-je ?… toute ma part… Je les veux toutes pour moi… vos douleurs… vos chères douleurs… Toutes, vous entendez ?… Seule à souffrir ?… Mais c’est monstrueux ce que vous dites là… Ah !… non… mille fois non… (Caressant.) Je veux que vous soyez heureuse ?

L’Amante

Ah ! comment puis-je être heureuse, maintenant… puisque…