Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 1.djvu/257

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Un grand secret, vous dis-je,
Qu’il vient de découvrir en ce même moment,
Et qui, sans doute, importe à tous deux grandement.
Voilà mon ambassade.




Scène III, 3



Albert

Oh ! Juste ciel, je tremble !
Car enfin nous avons peu de commerce ensemble.
Quelque tempête va renverser mes desseins,
Et ce secret, sans doute, est celui que je crains.
L’espoir de l’intérêt m’a fait quelque infidèle,
Et voilà sur ma vie une tache éternelle :
Ma fourbe est découverte. Oh ! Que la vérité
Se peut cacher longtemps avec difficulté,
Et qu’il eût mieux valu pour moi, pour mon estime,
Suivre les mouvements d’une peur légitime,
Par qui je me suis vu tenté plus de vingt fois
De rendre à Polydore un bien que je lui dois,
De prévenir l’éclat où ce coup-ci m’expose,
Et faire qu’en douceur passât toute la chose !
Mais, hélas ! C’en est fait, il n’est plus de saison ;
Et ce bien, par la fraude entré dans ma maison,
N’en sera point tiré, que dans cette sortie
Il n’entraîne du mien la meilleure partie.




Scène III, 4



Polydore

S’être ainsi marié sans qu’on en ait su rien !
Puisse cette action se terminer à bien !
Je ne sais qu’en attendre, et je crains fort du père
Et la grande richesse et la juste colère.
Mais je l’aperçois seul.

Albert

Dieu ! Polydore vient !

Polydore

Je tremble à l’aborder.

Albert

La crainte me retient.

Polydore