Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 2.djvu/103

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et il n’y a pas trois semaines que j’en ai vu, moi qui vous parle, un effet merveilleux.

Don Juan

Et quel ?

Sganarelle

Il y avait un homme qui, depuis six jours, était à l’agonie, on ne savait plus que lui ordonner, et tous les remèdes ne faisaient rien ; on s’avisa à la fin de lui donner de l’émétique.

Don Juan

Il réchappa, n’est-ce pas ?

Sganarelle

Non, il mourut.

Don Juan

L’effet est admirable.

Sganarelle

Comment ! il y avait six jours entiers qu’il ne pouvait mourir, et cela le fit mourir tout d’un coup. Voulez-vous rien de plus efficace ?

Don Juan

Tu as raison.

Sganarelle

Mais laissons là la médecine, où vous ne croyez point, et parlons des autres choses ; car cet habit me donne de l’esprit, et je me sens en humeur de disputer contre vous. Vous savez bien que vous me permettez les disputes, et que vous ne me défendez que les remontrances.

Don Juan

Eh bien ?

Sganarelle

Je veux savoir un peu vos pensées à fond. Est-il possible que vous ne croyiez point du tout au ciel ?

Don Juan

Laissons cela.

Sganarelle

C’est-à-dire que non. Et à l’enfer ?

Don Juan

Eh !

    était peu connu, lorsqu’un médecin d’Abbeville l’administra à Louis XIV, pendant une maladie grave que ce prince fit à Calais. Le médecin picard, nommé Dusauleboy, sûr de l’effet de son spécifique, s’asseyait sur le lit du roi, en disant : « Voilà un garçon bien malade, mais il n’en mourra pas. » Le roi ne mourut pas, et le vin émétique fit bruire ses fuseaux.