Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 2.djvu/530

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oute notre chaleur demeure suspendue ?
À vous faire éclater notre zèle aujourd’hui,
Nous craignons de faillir et de vous méconnaître.
Nous voyons bien en vous Amphitryon paraître,
Du salut des Thébains le glorieux appui ;
Mais nous le voyons tous aussi paraître en lui,
Et ne saurions juger dans lequel il peut être.
Notre parti n’est point douteux,
Et l’imposteur par nous doit mordre la poussière ;
Mais ce parfait rapport le cache entre vous deux ;
Et c’est un coup trop hasardeux
Pour l’entreprendre sans lumière.
Avec douceur laissez-nous voir
De quel côté peut être l’imposture ;
Et dès que nous aurons démêlé l’aventure,
Il ne nous faudra point dire notre devoir.

Jupiter
Oui, vous avez raison ; et cette ressemblance
À douter de tous deux vous peut autoriser.
Je ne m’offense point de vous voir en balance :
Je suis plus raisonnable, et sais vous excuser.
L’œil ne peut entre nous faire de différence,
Et je vois qu’aisément on s’y peut abuser.
Vous ne me voyez point témoigner de colère,
Point mettre l’épée à la main :
C’est un mauvais moyen d’éclaircir ce mystère,
Et j’en puis trouver un plus doux et plus certain.
L’un de nous est Amphitryon ;
Et tous deux à vos yeux nous le pouvons paraître.
C’est à moi de finir cette confusion ;
Et je prétends me faire à tous si bien connaître,
Qu’aux pressantes clartés de ce que je puis être,
Lui-même soit d’accord du sang qui m’a fait naître,
Et n’ait plus de rien dire aucune occasion.
C’est aux yeux des Thébains que je veux avec vous
De la vérité pure ouvrir la connaissance ;
Et la chose sans doute est assez d’importance,
Pour affecter la circonstance
De l’éclaircir aux yeux de tous.
Alcmène attend de moi ce public témoignage :
Sa vertu, que l’éclat de ce désordre outrage,