Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 2.djvu/538

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Que c’est le grand maître des Dieux
Que, sous les traits chéris de cette ressemblance,
Alcmène a fait du Ciel descendre dans ces lieux ;
Et quant à moi, je suis Mercure,
Qui, ne sachant que faire, ai rossé tant soit peu
Celui dont j’ai pris la figure :
Mais de s’en consoler il a maintenant lieu ;
Et les coups de bâton d’un Dieu
Font honneur à qui les endure.

Sosie
Ma foi ! Monsieur le Dieu, je suis votre valet :
Je me serais passé de votre courtoisie.

Mercure
Je lui donne à présent congé d’être Sosie :
Je suis las de porter un visage si laid,
Et je m’en vais au Ciel, avec de l’ambrosie,
M’en débarbouiller tout à fait.

Il vole dans le Ciel.

Sosie
Le Ciel de m’approcher t’ôte à jamais l’envie !
Ta fureur s’est par trop acharnée après moi ;
Et je ne vis de ma vie
Un Dieu plus diable que toi.
Scène 10
Jupiter, Cléanthis, Naucratès, Polidas, Sosie, Amphitryon, Argatiphontidas, Posiclès.

Jupiter dans une nue, sur son aigle, armé de son foudre, au bruit du tonnerre et des éclairs.
Regarde, Amphitryon, quel est ton imposteur,
Et sous tes propres traits vois Jupiter paraître :
À ces marques tu peux aisément le connaître ;
Et c’est assez, je crois, pour remettre ton cœur
Dans l’état auquel il doit être,
Et rétablir chez toi la paix et la douceur.
Mon nom, qu’incessamment toute la terre adore,
Étouffe ici les bruits qui pouvaient éclater.
Un partage avec Jupiter
N’a rien du tout qui déshonore ;
Et sans doute il ne peut être que glorieux
De se voir le rival du souverain des Dieux.