Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 3.djvu/377

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Aux yeux qui m'imposent des lois,
945 J'ai pris la forme que tu vois.

ZÉPHIRE
En tout vous êtes un grand maître,
C'est ici que je le connais.
Sous des déguisements de diverse nature
On a vu les Dieux amoureux
950 Chercher à soulager cette douce blessure
Que reçoivent les cœurs de vos traits pleins de feux:
Mais en bon sens vous l'emportez sur eux,
Et voilà la bonne figure
Pour avoir un succès heureux,
955 Près de l'aimable sexe où l'on porte ses vœux.
Oui, de ces formes-là l'assistance est bien forte,
Et sans parler ni de rang, ni d'esprit,
Qui peut trouver moyen d'être fait de la sorte,
Ne soupire guère à crédit.

L'AMOUR
960 J'ai résolu, mon cher Zéphire,
De demeurer ainsi toujours,
Et l'on ne peut le trouver à redire
À l'aîné de tous les amours.
Il est temps de sortir de cette longue enfance
965 Qui fatigue ma patience,
Il est temps désormais que je devienne grand.

ZÉPHIRE
Fort bien, vous ne pouvez mieux faire,
Et vous entrez dans un mystère
Qui ne demande rien d'enfant.

L'AMOUR
970 Ce changement sans doute irritera ma mère.

ZÉPHIRE
Je prévois là-dessus quelque peu de colère.
Bien que les disputes des ans
Ne doivent point régner parmi des immortelles,
Votre mère Vénus est de l'humeur des belles,
975 Qui n'aiment point de grands enfants.
Mais où je la trouve outragée,
C'est dans le procédé que l'on vous voit tenir,
Et c'est l'avoir étrangement vengée,
Que d'aimer la beauté qu'elle voulait punir.
980 Cette