Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 3.djvu/530

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LES FEMMES SAVANTES.

Ariste.
Ces gens vous aiment ?

Bélise.
Ces gens vous aiment ? Oui, de toute leur puissance.

Ariste.
Ils vous l’ont dit ?

Bélise.
Ils vous l’ont dit ? Aucun n’a pris cette licence,
Ils m’ont su révérer si fort jusqu’à ce jour,
Qu’ils ne m’ont jamais dit un mot de leur amour.
Mais pour m’offrir leur cœur et vouer leur service,
Les muets truchements ont tous fait leur office.

Ariste.
On ne voit presque point céans venir Damis.

Bélise.
C’est pour me faire voir un respect plus soumis.

Ariste.
De mots piquants, partout, Dorante vous outrage.

Bélise.
Ce sont emportements d’une jalouse rage.

Ariste.
Cléonte et Lycidas ont pris femme tous deux.

Bélise.
C’est par un désespoir où j’ai réduit leurs feux.

Ariste.
Ma foi, ma chère sœur, vision toute claire.

Chrysale, à Bélise.
De ces chimères-là vous devez vous défaire.

Bélise.
Ah ! chimères ! ce sont des chimères, dit-on.
Chimères, moi ! Vraiment, chimères est fort bon !
Je me réjouis fort de chimères, mes frères ;
Et je ne savois pas que j’eusse des chimères.


Scène IV.

Chrysale, Ariste.

Chrysale.
Notre sœur est folle, oui.

Ariste.
Notre sœur est folle, oui. Cela croît tous les jours.
Mais, encore une fois, reprenons le discours.