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LA RANÇON

mie du bonheur domestique, continuait de démoraliser l’intelligence, l’âme et le cœur du travailleur dans ses vapeurs abrutissantes.

Marie-Louise priait avec toute la ferveur de son cœur virginal pour la conversion de cette âme si chère. Quand elle entendait, à l’heure ordinaire où l’homme rentrait chez lui, un pas lourd qui butait à chaque marche de l’escalier, elle soupirait douloureusement, et tandis que l’ivrogne, après s’être laissé tomber sur sa couche, dormait l’épais sommeil de l’ivresse, la pure enfant se prosternait et répandait des pleurs au pied du crucifix, divin consolateur et suprême réconfort des plus amères détresses et des plus désespérantes douleurs. Lorsque les premières lueurs de l’aube venaient de nouveau éclairer le logis, bien souvent Marie-Louise priait et pleurait encore…

* * *

« Eh bien, ma chère enfant, aurais-tu une bonne nouvelle à m’apprendre, que tu me sembles plus joyeuse que de coutume ? » — questionnait affectueusement sœur Thérèse en caressant de sa main fine et pâle le front lisse de sa protégée — est-ce que ton père se corrigerait ?…

— Je crois, ma sœur, et je suis même convaincue, que mes vœux seront bientôt comblés — répondit la jeune fille.

— Vraiment petite ! mais d’où te vient cette heureuse certitude ?

— C’est que pour fléchir le bon Dieu j’ai enfin pris le bon moyen.

— Comment cela — répliqua la bonne religieuse intri-