Page:Monod - Portraits et Souvenirs, 1897.djvu/250

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donc vu d’abord tous les jours, puis toutes les semaines, à l’époque où il était, je ne dirai pas dans la force de l’âge (car jusqu’au jour où il a été terrassé par la maladie, les années ne lui ont rien ôté de sa force et de sa jeunesse), mais au premier épanouissement de son talent et de sa renommée, où il s’avançait dans la vie, souriant, heureux, confiant dans la puissance de sa parole et de sa plume pour le triomphe des idées qui lui étaient chères, avide de jouir de toute chose intelligente et belle, de connaître et d’être connu, d’agir et de faire du bien. Tout en consacrant le meilleur de lui-même à la double cause du christianisme évangélique et du développement des Églises libres, tout en ne négligeant ni le soin des pauvres, ni la cure d’âmes, tout en jouant un rôle actif dans les Sociétés religieuses et les réunions pastorales, il ne croyait pas que rien de ce qui est digne de passionner l’humanité, liberté politique, réformes sociales, art, littérature, pût lui rester étranger. C’était bien l’âme la plus chrétienne à la fois et la plus séculière qui fût jamais. Sa foi religieuse était le foyer de sa vie ; mais il n’en enfermait pas les flammes derrière les murs du sanctuaire, il les laissait rayonner sur le monde. Tandis qu’il continuait son grand ouvrage sur les Trois premiers siècles de l’Église chrétienne, il entreprenait la première étude sérieuse qui eût encore été faite sur les rapports de l’Église et de l’État pendant la Révolution et l’Empire ; il visitait la