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SA VIE, SON ŒUVRE

« Ces vers sont l’œuvre d’un jeune homme de quiuze ans, » ajoute en note le Courrier de Bordeaux (27 avril 1840).

Il est certain que Charles Monselet venait à peine de refermer les Orientales, de Victor Hugo, quand il composa cette ode ; — à la fois conquis et charmé par le poète, auquel il devait consacrer toute sa vie une admiration sans bornes, il en imitait le mouvement et la facture.

Mais le véritable début littéraire du jeuue écrivain date de la publication, dans le Courrier de la Gironde (20 mars 1842), d’un poème intitulé : Dans un pavillon. Le grand journal bordelais faisait précéder cette insertion de la note suivante :


Les vers qu’on va lire sont l’œuvre d’un jeune homme de seize ans. Ils annoncent un talent d’un ordre tout à fait supérieur. Sauf quelques négligences, quelques épithètes vulgaires, ces vers sont, dans leur ensemble, dignes d’André Chénier, et c’est un enfant qui les laisse tomber de ses lèvres.


Voici le meilleur passage à retenir de cette pièce :


Enfant, puise la force à mon calme regard,
Prends ma harpe sonore et chante : Je suis l’Art !
Je suis l’Art éternel, un Messie, un mystère,
Un symbole incréé, l’ange de cette terre !
Six mille ans ont passé : beau comme au premier jour,
Au sein du monde entier je veille avec amour,
Et je règne : à mes pieds, des serviteurs d’élite
Épanchent autour d’eux ma parole traduite.
Ceux-là sur une toile ou sur un piédestal
S’attachent à donner la forme à l’idéal,
Les uns versent partout des torrents de musique,
Quelque chose d’ému, d’ardent, de sympathique ;
D’autres s’en vont bâtir des tours, des panthéons,
Et du noble et du beau concentrent les rayons.
Ta place est là, mon fils, parmi cette phalange,
Poète aux cheveux blonds, à la prunelle d’ange ;
Ceins la blanche tunique et va par les chemins,
Sur la foule qui passe étendre les deux mains :