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CHARLES MONSELET

» … Dans une loge, on remarquait le duc de Fronsac, le fils du maréchal, de passage à Bordeaux.

On ne comptait pas les jolies femmes. Ruisselantes de bijoux, elles portaient sur leurs blanches épaules des fortunes considérables.

» Tout ce monde attendait le bon plaisir du gouverneur. Enfin, une rumeur plus grande que les autres annonça sa présence. Le maréchal de Richelieu faisait son entrée dans la loge du gouvernement, escorté d’une suite nombreuse. Il était vêtu magnifiquement, selon son habitude. Il avait au cou le collier du Saint-Esprit et le grand cordon en sautoir ; il était coiffé d’un vaste chapeau à plumes blanches… »


Qu’y a-t-il de surprenant après cela que Monselet ait passé aux yeux de bien des gens, pour un Bordelais de naissance ; et que les Bordelais eux-mêmes l’aient traité parfois de compatriote et lui aient fait fête ? N’était-il pas des leurs, en effet, et n’avaient-ils pas raison de le revendiquer ? Ne leur avait-il pas consacré sa jeunesse, et, avec cette prime jeunesse, les premières rimes de son jeune talent ? N’avait-il pas enfin laissé comme un lambeau de son cœur dans cette seconde patrie ?

Aussi, comme il aimait à évoquer cette époque si brillante de ses débuts, comme il remuait à plaisir les cendres de ce passé disparu, au foyer duquel son clair regard retrouvait soudain une flamme nouvelle, son esprit une seconde fièvre qui lui rendait plus consolantes les heures d’amertume et de regrets.

La presse bordelaise, — disons-le à son honneur — lui a gardé de tout temps une vive reconnaissance et voué jusqu’après la mort une profonde admiration.

Un décret en date du 14 novembre 1889 a, conformément au vœu formulé par le conseil municipal de Bordeaux, accordé le nom de Charles Monselet à une des voies nouvelles de cette ville.