Page:Monselet - La Franc-maçonnerie des femmes, 1861.djvu/164

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« — D’où vous vient ce surnom de Pandore ?

« — Oh ! cela remonte à bien longtemps, a-t-elle répondu.

« — Bien longtemps, pour vous, c’est combien ? ai-je dit en souriant.

« — Quatre ans ; peut-être davantage. Un grand artiste à qui mon nom de baptême déplaisait m’a choisi une nouvelle patronne dans le dictionnaire de la Fable.

« — Quel est donc votre vrai nom ?

« — Michelle.

« — Pandore est plus joli, effectivement ; mais savez-vous ce que c’était que la Pandore antique ?

« — On me l’a raconté ; je ne m’en souviens pas beaucoup. C’était, je crois, une statue qui devint une femme.

« — Oui. Mais c’était autre chose encore. C’était le principe de toute beauté et de tout mal, de toute séduction et de tout désespoir.

« Pandore se mit à rire.

« — Selon vous, dit-elle, je réalise ce mélange mythologique, et je justifie entièrement

« —mon surnom.

« — Je ne vais pas si loin ; mais je comprends que cette idée ait pu venir à l’esprit de quelques personnes.

« — Voyons : avouez que vous brûler du désir de m’envoyer un méchant compliment enveloppé dans un madrigal. Je connais cela. Vous voulez me classer dans la catégorie des jolis monstres…

« — Oh !

« — Des vampires délicieux, des vipères à robe chatoyante…

« — Non.

« — Dites tout de suite que je suis un gouffre de corruption, que je n’ai aucun côté naïf, que mon cœur est plus usé et plus racorni que le cœur d’un vieux diplomate autrichien. Faites à mon intention une mixture de Manon Lescault et de la comtesse Fœdora, et servez chaud.

« Voilà comment elle me déconcerte, mon cher Léopold, en allant elle-même au-devant de mes appréhensions, et cela avec une mutinerie, un entrain que la plume ne peut te traduire.

« Une autre fois (car je me plais à l’interroger sur toutes les