Page:Monselet - La Franc-maçonnerie des femmes, 1861.djvu/198

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Ce remords datait de son retour, alors qu’en ouvrant un journal il y avait lu, à son immense surprise, le récit du vol accompli chez Philippe Beyle. Jusqu’à cette lecture, le comte n’avait pu se résoudre à prendre au sérieux cette lettre anonyme et surtout cet ordre adressé à Pandore « d’avoir à ruiner M. Philippe Beyle dans un délai de trois mois. » Il croyait à une plaisanterie, à une gageure. Mais en présence d’une réalisation aussi terrible et aussi ponctuelle, il frémit. Deux idées fixes se dégagèrent immédiatement de la nuée sombre de ses méditations. La première, c’est que Pandore appartenait à une association infâme. La seconde, qu’il était, lui, le complice de Pandore par le silence qu’il avait tenu avant et après l’événement du 26 octobre.

Si sa fortune le lui eût permis, il n’eût pas balancé une minute à rembourser secrètement Philippe Beyle. Il plaignait de tout son cœur ce jeune homme dont il oubliait la rivalité passagère ; et, devant son malheur, il se repentait du jugement sévère qu’il avait autrefois porté sur lui.

Cette préoccupation constante lui fit rechercher des moyens d’indemnité, de compensation. Ébranlée par ce grave scrupule d’honneur, sa tête travailla pour la première fois ; et, comme il arrive ordinairement pour les autres indolentes qui se mettent en frais de décisions, il fut tout surpris de découvrir dans sa cervelle des trésors d’invention, des mines vierges de diplomatie. Il explora avec un contentement inexprimable ces domaines inconnus de son intelligence, et il finit par organiser un plan qui, pour un coup d’essai, valait presque un coup de maître ; un plan qui, tout en satisfaisant ses desseins de restitution, embrassait ses propres intérêts, en même temps qu’il le vengeait définitivement de la comtesse, sa femme. Ce plan, au développement duquel le lecteur va assister, reposait tout entier sur Philippe Beyle.

En conséquence, pendant six mois le comte d’ Ingrande ne