Page:Monselet - La Franc-maçonnerie des femmes, 1861.djvu/444

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dont elle n’aurait probablement jamais fait partie sans cette circonstance. Si c’est un crime de ma part de l’y avoir entraînée, je consens à ce que ce soit vous qui m’en fassiez le reproche.

— Eh ! madame, que ne me laissiez-vous exposé à la haine de Marianna ! J’aurais mieux aimé cela. Aux mauvais jours de ma vie, j’ai souvent rencontré devant moi le canon d’un pistolet, j’ai vu bien des embûches se dresser sur ma route, j’ai dû avoir raison de bien des trahisons ; vous voyez pourtant que je suis toujours vivant. La vengeance de Marianna ! mais je l’eusse attendue de pied ferme, entre l’amour de ma femme et ma propre dignité. Et quand même j’aurais dû succomber dans cette lutte, eh bien, je serais mort en plein bonheur et en plein honneur !

Un silence suivit ces paroles. La marquise de Pressigny le rompit la première.

— Enfin, monsieur, mes meilleures intentions m’auront été doublement funestes.

— Comment cela, madame ?

— J’ai perdu ma nièce et j’ai trouvé un ennemi.

— Un désapprobateur.

— Si j’ai bien compris cependant, la Franc-maçonnerie des femmes a désormais en vous un adversaire implacable, dit-elle avec inquiétude.

— Ma première pensée avait été en effet d’invoquer la loi.

La marquise tressaillit.

— Mais la réflexion m’a fait renoncer à ce projet. Provoquer une instruction, c’eût été livrer aux tribunaux une liste de noms parmi lesquels je ne pouvais oublier qu’on trouverait en tête celui de Mme Beyle.

— Vous avez sagement agi.

— La mort d’Amélie m’a d’ailleurs rendu à peu près insensible.

— Alors, monsieur, je puis compter sur votre discrétion ? demanda-t-elle en l’observant.

— Sur ma discrétion seulement.

— Que voulez-vous dire ?

— Cette visite est la dernière que je vous fais, madame.