Page:Monselet - La Franc-maçonnerie des femmes, 1861.djvu/87

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le premier convoi du chemin de fer, et des caravanes de baigneurs montant d’étranges petits chevaux, pris au lacet dans les landes du Maransin et balayant le sable de leur queue.

Sans les émotions qui l’agitaient, Marianna n’eût certainement pas manqué d’accorder un coup d’œil aux sites admirables et exceptionnels dont elle était environnée.

D’un côté, s’étendait le bassin d’Arcachon, vaste antichambre de la mer ; de l’autre, la forêt de la Teste, toute parfumée d’une odeur de résine. De distance en distance, au milieu de ces masses épaisses de verdure sombre, s’ouvraient de larges allées, ménagées pour prévenir les incendies, si rapides et si violents dans la contrée ; ces chemins s’appellent en gascon des bire-huc, comme qui dirait détourne-feu. La couleur monotone et attristante des pins était rompue quelquefois par l’osier rouge des vignes et la ronce ordinaire, qui élançaient des pousses folles ; quelquefois aussi, mais à demi étouffés dans le sable, se montraient des coquelicots et des orties blanches ; alors, le contraste devenait d’autant plus charmant qu’il était inattendu.

Quand, du paysage, le regard allait aux rares maisons qui se dessinaient sur la nudité de la plage, on constatait avec plaisir qu’aucune d’elles n’offrait encore ce caractère colifichet qui déshonore tous les bains de mer. Point de ces chalets qui ont l’air de sortir de la vitrine d’un pâtissier, point d’imitations du style gothique. C’étaient tout simplement des maisons en pierre, carrées, un peu mornes, comme les lieux où elles, s’élevaient.

L’endroit désigné sous le nom de débarcadère d’Eyrac était le point central de la fête ; on y avait dressé une sorte d’amphithéâtre destiné aux notables de la localité et au public payant.

Des mâts pavoisés et des lanternes de couleur témoignaient de la magnificence municipale, la même par toute la France. Baigneurs et baigneuses remplissaient déjà les gradins ; les ombrelles bigarrées ondoyaient au soleil ; l’or des chapeaux de paille, qui étaient en majorité, donnait l’idée d’une moisson mouvante. Quant à la population laborieuse de la Teste, aux résiniers, aux bergers, aux pêcheurs, ils étaient tous groupés