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LE COUSIN JACQUES.

transporter. — la permission d’y fonder le susdit théâtre à quatre sous. Lécluze fit donc construire rue de Bondy, au coin de la rue de Lancry, une salle qui n’existe plus, et dont il n’eut même pas la gloire de faire l’ouverture, car il revendit presque immédiatement son privilége. « Il avait débuté par prendre un carrosse, dit un de ses contemporains[1], et il n’avait pas de chemise ; les chevaux mangèrent le carrosse, Lécluze mangea les chevaux, les filles mangèrent Lécluze, qui fut forcé de se réfugier au Temple. Plus tard, il alla faire les délices de la province. Je lui ai entendu chanter la romance de la Fileuse avec une voix de soixante-dix ans, ce qu’on appelle voix de rogomme ; il figurait la quenouille avec son épée et imitait parfaitement tous les mouvements de quelqu’un qui file. »

En 1790, l’ancien théâtre du sieur Lécluze, après avoir traversé bien des périodes de décadence, se releva par la pièce de Nicodème dans la Lune, qui fit entrer plus de cent mille écus dans la caisse du directeur, — tandis qu’elle ne rapporta en tout que seize cents livres à son auteur. Il avait tout fait cependant : les airs et même le plan de l’ouverture. Les rues de Paris ont retenti pendant plusieurs années de : Colinette au bois s’en alla (que mademoiselle Déjazet nous a rendue dans la pièce des Prés Saint-Gervais), et de la ronde : L’autre jour la petite Isabelle. Car il est juste de remarquer ici que ce n’est pas uniquement par la force de l’allusion que les pièces du Cousin Jacques se sont soutenues au théâtre.

  1. Plancher Valcour, Mes Caravanes, 1816. 4 vol. in-12.