Page:Monselet - Les Oubliés et les Dédaignés, 1876.djvu/210

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
196
OUBLIÉS ET DÉDAIGNÉS.

17 décembre, ainsi que le témoigne l’acte de décès que nous avons tenu à faire relever.

Il nous semble qu’après tout le Cousin Jacques dut s’en aller de ce monde sans trop de tristesse ; il fut pendant quinze ans un auteur à la mode ; ses pièces firent ce qu’on appelle fureur. Que pouvait-il exiger de plus ? Il eut toutes les satisfactions d’amour-propre que l’on peut désirer : longtemps on fit des bonnets et des poufs aux Ailes de l’Amour ; un faïencier s’enrichit en vendant des gobelets au Cousin Jacques, en cristal, très-joliment sculptés, ornés d’un croissant avec des étoiles parsemées alentour. Enfin il existait encore, il y a quelques années, dans la rue du Four-Saint-Germain, un vieux magasin à l’enseigne de la Petite Nanette. En faut-il davantage pour constituer une célébrité évidente ?

Son buste, haut de dix-huit pouces, se voit à la bibliothèque de Laon. De son vivant, il l’expédiait lui-même à quiconque lui en faisait la demande. — Prix : 12 livres tout emballé. Ainsi comprenait-il la gloire.

C’est par de semblables côtés qu’il se détache des écrivains ordinaires, et qu’il acquiert une individualité réelle et amusante.

Esprit véritablement français, mais français dans l’acception du mot la plus frivole, nature abondante, ruisselante, débordante même, imagination bigarrée comme pas une, tête pleine de fusées, le Cousin Jacques est le dernier et le seul représentant de la tradition macaronique au dix-huitième siècle. Sans avoir la rouerie profonde de ses devanciers, il en a tout le joyeux, tout le bruyant ; il pousse le burlesque jusqu’aux dernières extrémités. Toutefois, il sait accommoder ses plus étonnantes inventions au goût de