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OUBLIÉS ET DEDAIGNÉS.

tion de La Harpe à l’Académie française, et imprima un article où le récipiendaire était traité avec le plus cordial acharnement. Les académiciens, à qui les avocats avaient tracé l’exemple, demandèrent vengeance et l’obtinrent également. Quelques jours après l’apparition de l’article, le libraire Panckoucke reçut la lettre suivante de M. Le Camus de Néville, chargé de la police de la librairie :

« Monsieur,

« M. le garde des sceaux, en me parlant, dans sa lettre en date d’hier, 31 juillet 1776, du Journal de politique et de littérature, me marque : « Je vous prie de vouloir bien dire au sieur Panckoucke de ne plus faire rédiger par le sieur Linguet la portion littéraire de ce journal, etc. »

« Vous voudrez bien me certifier la réception de l’ordre du ministre.

« Je suis, Monsieur, etc. »

L’injonction était impérieuse. Supprimé deux fois comme avocat et comme journaliste, Linguet adressa à Louis XVI une lettre plus irritée que suppliante, dans laquelle, défendant son article incriminé, il redouble d’invectives envers La Harpe, qu’il appelle petit homme orgueilleux, insolent et bas, — et envers l’Académie elle-même, qu’il regarde comme une institution inutile et dangereuse, « au point, dit-il, qu’un style ridicule, ampoulé, hors de la nature, on l’appelle un style académique ! »

Après avoir discuté le délit qu’on lui impute, il ajoute :

« Tout homme qui a donné un soufflet est répré-