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DES ROMAINS, CHAP. XXIII.

Dans le temps de Basile Porphyrogénète, la puissance des Arabes fut détruite en Perse. Mahomet, fils de Sambraël, qui y régnait, appela du nord trois mille Turcs en qualité d’auxiliaires[1]. Sur quelque mécontentement, il envoya une armée contre eux ; mais ils la mirent en fuite. Mahomet, indigné contre ses soldats, ordonna qu’ils passeraient devant lui vêtus en robes de femmes ; mais ils se joignirent aux Turcs, qui d’abord allèrent ôter la garnison qui gardait le pont de l’Araxe, et ouvrirent le passage à une multitude innombrable de leurs compatriotes.

Après avoir conquis la Perse, ils se répandirent d’orient en occident sur les terres de l’Empire, et, Romain Diogène ayant voulu les arrêter, ils le prirent prisonnier et soumirent presque tout ce que les Grecs avaient en Asie, jusqu’au Bosphore.

Quelque temps après, sous le règne d’Alexis Comnène, les Latins attaquèrent l’Occident. Il y avait longtemps qu’un malheureux schisme avait mis une haine implacable entre les nations des deux rites, et elle aurait éclaté plus tôt si les Italiens n’avaient plus pensé à réprimer les Empereurs d’Allemagne, qu’ils craignaient, que les Empereurs grecs, qu’ils ne faisaient que haïr.

On était dans ces circonstances, lorsque tout à coup il se répandit en Europe une opinion religieuse que les lieux où Jésus-Christ était né, ceux où il avait souffert, étant profanés par les Infidèles, le moyen d’effacer ses péchés était de prendre les armes pour les en chasser. L’Europe était pleine de gens qui aimaient la guerre, qui

    un grand empire. Ce texte est déjà modifié dans la seconde édition de 1734.

  1. Histoire écrite par Nicéphore Bryenne César, Vies de Constantin Ducas et de Romain Diogène. (M.)