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ÉLOGE DE BERWICK.

besogne un peu trop forte pour lui, et le duc de Berwick s’en revint.

En 1701 il perdit le roi son père, et, en 1702, il servit en Flandre sous le duc de Bourgogne et le maréchal de Boufflers. En 1703, au retour de la campagne, il se fit naturaliser françois, du consentement de la cour de Saint-Germain.

En 1704, le roi l’envoya en Espagne avec dix-huit bataillons et dix-neuf escadrons qu’il devoit commander ; et, à son arrivée, le roi d’Espagne le déclara capitaine général de ses armées, et le fit couvrir[1].

La cour d’Espagne étoit infestée par l’intrigue. Le gouvernement alloit très-mal, parce que tout le monde vouloit gouverner. Tout dégénéroit en tracasseries ; et un des principaux articles de sa mission étoit de les éclaircir. Tous les partis vouloient le gagner : il n’entra dans aucun ; et, s’attachant uniquement au succès des affaires, il ne regarda les intérêts particuliers que comme des intérêts particuliers ; il ne pensa ni a madame des Ursins, ni a Orry, ni à l’abbé d’Estrées, ni au goût de la reine, ni au penchant du roi ; il ne pensa qu’à la monarchie.

Le duc de Berwick eut ordre de travailler au renvoi de madame des Ursins. Le roi lui écrivit : « Dites au roi mon petit-fils qu’il me doit cette complaisance. Servez-vous de toutes les raisons que vous pourrez imaginer pour le persuader ; mais ne lui dites pas que je l’abandonnerai, car il ne le croiroit jamais. » Le roi d’Espagne consentit au renvoi.

Cette année 1704 le duc de Berwick sauva l’Espagne,

  1. C’est-à-dire lui donna le titre de grand d’Espagne, qui permet de se couvrir devant le roi.